Infantes suivie de "L'Audience de Madrid"
Elle a cinq ans et nous attend depuis plus de trois siècles. Nimbée de grâce infantile, dans la spontanéité de son âge et déjà royale.
Pour elle, le majordome de Philippe IV a inventé la photographie et les paparazzi avant l’heure, saisissant quelques secondes d’intimité, volant le secret d’un instant pour masquer le sacre perdu.
Le « repentir » de son portrait marque ainsi la perte d’un royaume au profit des infants Felipe Prosper et Charles II, ce moment qui porte déjà le legs de l’héritage espagnol des Habsbourg à la dynastie des Bourbons. Mais Dieu a voulu que l’hommage de l‘art étende sa gloire éphémère de générations en générations, que cette destitution devienne une apothéose artistique, qu’un peintre éclaire son destin et celui de ses pareilles, captant dans un chef-d’œuvre la grandiose vanité de se sacrifier à la postérité.
D’elle, nous ne retenons que ces minutes d’éternité, l’incarnation d’un principe qui la dépasse, l’écrase et l’anoblit. Ce récit est l’essence d’une existence, le temps d’un rai de lumière à l’Alcazar, cet après-midi-là.
Il y a audience royale à Madrid.
Caroline Lampre est avocate. Elle est l’auteure d’un premier roman «Ressacs d’Ebène» publié sous le pseudonyme de Wetzlar aux Editions Les Perséides.